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 Sibille 1

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Sibille Asinis
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Sibille Asinis
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Date d'inscription : 05/03/2019

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MessageSujet: Sibille 1   Sibille 1 Icon_minitimeLun 27 Déc - 15:27

LES CHAÎNES DE LA REINE

Sibille 1


— Je ne t’ai pas élevée pour être si faible.

Les mots furent comme autant de poignards au cœur de la jeune reine. Elle baissa le regard, perdant de sa superbe face à celle qui l’avait éduquée. Tréla l’avait prise sous son aile déjà avant qu’elle ne naisse, lorsqu’il fut annoncé que la première née d’Anemos serait l’Élue tant attendue par les Carmines.

— Ne sois pas si dure avec elle, grand-mère, la défendit Ambiose.

Sibille tourna un regard plein de reconnaissance vers son frère. Il avait toujours été bien plus doux qu’elle, bien plus malléable. Elle en avait fait son parfait petit chien, lui qui ne jurait que par sa grande sœur adorée. Il l’adulait même plus que Mageia, c’était dire sa dévotion. Mais d’une main, la reine l’enjoignit à se taire. Elle saurait se défendre seule.

— Ce n’est pas une preuve de faiblesse que d’aspirer à la paix.
— C’en est une de proposer une trêve à nos ennemis.
— Ce n’est pas une trêve mais une discussion. C’est bien toi qui m’a appris à ne pas jouer l’idiote ?

Le silence se fit, glacial. Tréla avait posé sur sa petite-fille des yeux furieux qui n’appelaient qu’à la guerre. Si Sibille tenait d’elle son caractère manipulateur et sa maîtrise du mensonge, elle lui devait aussi sa personnalité parfois emportée et trop sanguine. Les Carmins étaient des impulsifs, des primesautiers, mais ils avaient eu la patience du loup en chasse lorsqu’il s’agit d’attendre après la venue d’une Élue promise.

— Ne sois pas insolente.
— Je suis reine, tonna soudain Sibille.

Tréla eut soudain un sourire aux accents terribles. Empreinte de critique, elle jugeait la capacité de sa petite-fille à tenir son trône et brisait en cela le cœur de l’Élue.

— Oh, pardonne-moi, ma reine. Veux-tu aussi que je baise tes saints pieds ?
— C’est toi qui te montres insolente désormais.
— Peu importe. Tu nous précipites vers la défaite avec tes rêves de paix, gronda Tréla.
— Je cherche une alternative à la guerre, c’est tout ! Ne me fais pas croire que tu ne rêves pas à un moment de répit, tu n’as jamais cessé de prier de toute ton existence, et depuis que je suis née, tu me mènes au bâton vers tes rêves de sang.

L’aïeule plissa les yeux.

— Les rêves de Mageia ; je ne t’ai jamais menée que vers les rêves de Mageia. Tu sembles l’avoir oublié.
— Grand-mère.

Sibille s’agenouilla près d’elle, saisit ses mains qui ne frémissaient plus de colère depuis longtemps. Elle tritura les doigts de Tréla, ses yeux se firent presque suppliants.

— Crois en moi quand je te dis que cette réunion nous mènera vers un monde meilleur. Au mieux, les feux de la guerre se tairont, au pire, nous la mènerons. Je te demande simplement de tenir la capitale tandis que j’irai négocier cet avenir meilleur.
— Mais qui te dit que l’avenir sera meilleur si tu épargnes tous ceux qui te font la guerre ? Ils ne veulent pas de toi sur le trône, à leurs yeux malheureux, tu portes le Mal. Crois-tu qu’ils reconnaîtront seulement ta légitimité au trône et que tu reviendras victorieuse ici, à la capitale ?

Un sourire, tout en sournoiserie, épousa soudain les lèvres de la reine.

— Me crois-tu si bête, grand-mère ? Il ne pourra rien m’arriver là-bas. Mageia veille sur moi et mes hommes fidèles aussi. S’ils refusent de reconnaître que je suis la seule vraie reine, s’ils refusent d’admettre que ma place est sur le trône, il en sera fini d’eux avant qu’ils aient le temps d’un soupir.

La vieille se recula sur son siège. Son visage s’éclaira alors tandis qu’elle comprenait que sa petite-fille n’était pas si sotte que cela. Mieux encore, Sibille n’avait pas l’esprit idéaliste, elle n’était pas de ces idiots qui croyaient au monde parfait. Elle ne croyait pas même en la paix totale, celle-ci n’était qu’une chimère. Elle rêvait au mieux, à ce qui était faisable. La reine avait entre ses mains des bouts de bois qu’elle pouvait assembler pour créer un monde mieux, mais jamais parfait. Toutes les fondations pouvaient être détruites, que ce soit par les lames des ennemis ou le feu d’un Sangérav. Tréla hocha alors la tête.

— Tu as donc tout prévu…
— Toutes les options ont été envisagées. Je ne céderai jamais ma couronne. Elle est mienne. Je l’ai obtenue justement, en vainquant les Iseal. Désormais, le règne de Talumen appartient à la maison Asinis. Et il n’en sera plus jamais autrement.
— Tu m’as fait peur, souffla l’aïeule.
— Je suis terrifiante, disent mes ennemis. Et j’espère le rester à leurs yeux. Qu’ils pensent que je porte la mort et le sang, tant mieux, je les réduirai à néant avant qu’ils n’aient le temps de s’emparer de mon trône.

Tréla eut un sourire mièvre.

— Tu seras une grande reine, Sibille. Ton règne restera gravé dans les mémoires et dans les cœurs jusqu’à la fin de notre monde. Le sais-tu ?
— Je le sais, grand-mère.

Un silence éteignit leurs deux voix alors qu’elles se regardaient en souriant. Sibille relâcha les mains de Tréla pour se relever, posant un regard calme sur Ambiose.

— Tu mèneras les troupes qui m’accompagneront à Dubh Sliabh. Père doit rester ici en sa qualité de Grand Maréchal des Forces Armées de l’Ouest. Je veux que tu sois à son image : un grand Général.
— Je le serai, Sibille.
— Tréla, s’il te plaît, prends soin de nos terres.

Elles eurent toutes deux un sourire fier tandis que leurs regards se croisaient.

— Talumen est nôtre maintenant. Il nous faut la garder précieusement.

Se redressant de toute sa hauteur, la fille des Carmines contempla la salle du trône autour d’elle, vidée de toute âme. Elle s’y sentait encore trop petite tandis que l’ombre de Mageia léchait les murs, ne la laissant jamais seule. Cela lui pesait de plus en plus, ce qui avait longtemps paru être une ambition pour elle se transformait peu à peu en fardeau trop lourd à ses épaules frêles. Mais Sibille se taisait et obéissait à ses devoirs, sans pour autant être un simple pantin. Elle s’y refusait toujours, de plus en plus, même. Elle fit un pas loin du trône.

— Je dois me préparer à mon départ. Nous prendrons la route du sud dans deux jours.
— Si tôt ? demanda Tréla.
— Je me dois d’être en avance sur les lieux. Tout d’abord, le Temple Supérieur devra être nettoyé. Je refuse de m’asseoir et de parlementer au milieu de cadavres des hérétiques de Lux. Ensuite, nous devrons hisser nos bannières pour faire comprendre à nos ennemis qu’il n’existe aucun autre règne en ce monde que le mien et celui de notre maîtresse. Pour finir, l’armée devra se mettre en place.

Sibille n’en dit pas plus. Elle avait donné suffisamment d’informations pour que Tréla comprenne. Elle donnerait plus d’indications à Ambiose par la suite, c’est lui qui mènerait les troupes après tout. Alors, sans un mot de plus, la jeune reine s’approcha de la sortie de la pièce.

— Mageia est guide, Mageia est foi, prononça-t-elle.

Mais la ferveur à ses lèvres se faisait menteuse désormais.

— Mageia est guide, Mageia est foi, répétèrent les deux Asinis en chœur.

*  *  *

— Conte-moi ton histoire, Elpichrys. Comment en es-tu arrivée là ?
— Ce n’est pas une histoire très intéressante, murmura la demoiselle.
— Raconte-moi quand même.

Elle quittait son visage de reine en la présence d’Elpichrys. La demoiselle de la maison Vevos était très silencieuse, probablement traumatisée par la nuit sanglante. C’était une nuit d’horreur qui n’avait satisfait que trop peu d’âmes. Sibille elle-même peinait à s’en targuer désormais, un sentiment étrange enflait en sa poitrine chaque fois qu’elle repensait à la petite Nova. Le pauvre petit chat n’avait jamais commis de mal en son existence, elle n’y avait probablement même jamais songé. La reine baissa les yeux en y repensant tandis qu’Elpichrys repassait un coup de brosse dans ses cheveux avec lenteur.

— Je suis née à Orumpis, comme vous le savez sans doute… Et je suis l’un des rares enfants des Carmines à avoir foulé le sol du continent ; j’étais une vraie sauvageonne, alors puisqu’on ne voulait pas de moi à Sardius, j’ai été envoyée à Talumen pour y apprendre les bonnes manières.

Elle eut un léger sourire, un peu triste.

— Je n’ai jamais fait que partie du décor, ici. Tout le monde se méfiait trop de la pauvre enfant venue des Carmines. Alors je me suis tournée vers les prêtresses, les seules à m’offrir un peu de leur considération. Elles m’ont appris les fois de Lux et de Nox, et sans jamais le dire à quiconque, j’ai continué à prier Mageia. Puis vous êtes venue pour tous nous sauver.

Son sourire se fit menteur, et Sibille fronça les sourcils en l’apercevant dans le miroir.

— Ne me mens pas, Elpichrys. Nous avons détruit tes idoles. Et je suis sûre que c’est l’une des raisons pour lesquelles tu t’es retrouvée dans les geôles.
— Effectivement, majesté. Pardonnez-moi… J’ai tenté de protéger les temples, et j’ai été arrêtée pour cela. J’imagine que vous m’avez prise à votre service pour me punir.

La reine se redressa, posant sur la demoiselle un regard peiné.

— Ne pense pas cela de moi, je t’en prie. Je ne suis pas le monstre que tous dépeignent.
— Je n’ai pas dit cela…
— Mais tu le penses, affirma la reine.
— Je suis navrée, majesté, je…

Sibille baissa les yeux. Tréla le lui avait dit deux jours plus tôt : son souvenir marquerait les âges. Mais souhaitait-elle que l’on se souvienne d’un monstre ? Non. Elle voulait être plus que cela, elle se rêvait émissaire de paix.

— Je ne suis pas Mageia. Je ne serai jamais la Reine-Sang, murmura-t-elle.

Revenant sur ses promesses, la jeune reine entendit le sifflement de sa déesse dans un coin de la pièce. Elle ferma les yeux, une larme roulant le long de sa joue. Elpichrys se précipita auprès d’elle pour saisir ses mains avec tendresse.

— Pardonnez-moi, majesté, je ne souhaitais pas vous faire de mal.
— Ce n’est pas toi qui m’en fais… Mais peu importe.

Sibille essuya ses larmes. Elle ne devait pas être faible. Ne le pouvait. Elle se releva, écartant la jeune demoiselle d’un geste de la main. Lui offrit un sourire délicat.

— Reste qui tu es au plus profond de toi-même, Elpichrys. Ne laisse jamais pervertir ce que tu as au fond de toi.

D’une certaine manière, elle lui rappelait Nova. Avec sa douceur, sa tendresse naturelle. Dépourvue de mal et de vice, Elpichrys était une perle de bienveillance. Sibille reprit ses mains entre les siennes.

— Promets-le moi avant que je ne parte.
— Je… Je vous le promets, ma reine.

Sibille eut un sourire plus chaleureux, presque maternel. D’une main, elle vint caresser les cheveux de celle qu’elle avait fait sa dame d’atour.

— Tu vaux mille fois plus que ce que le monde cherchera à te faire croire. Tu ne dois jamais laisser ton esprit être perverti par le monde qui t’entoure ; car ce monde est cruel. Il est profondément mauvais, et que seule, je ne pourrai le changer.
— Je serai à vos côtés, majesté.
— Et je t’en remercie.

Un cor sonna dans la cour, coupant la parole à la jeune reine. Elle tourna les yeux vers la fenêtre qui donnait sur la cour. On l’attendait en bas. Elle se redressa, repassa un doigt sous ses yeux pour en effacer toute trace de tristesse. Elle reprit son visage de reine.

— Je dois y aller maintenant. Prends soin de toi en mon absence.

Le silence se fit, avant qu’Elpichrys ne se jette désespérément aux pieds de la reine.

— Emmenez-moi. Par pitié, emmenez-moi avec vous. Je ne peux rester seule ici. Je veux vous servir.

Sibille s’immobilisa. Elle sourit alors, caressant les cheveux clairs avec délicatesse.

— Viens, alors ; j’aurai besoin d’une amie à mes côtés.

Le visage d’Elpichrys s’illumina sous un sourire. Elle hocha la tête et se releva lentement. Toutes deux achevèrent de se préparer et partirent vers la cour. Sibille choisit de monter à cheval plutôt que d’emprunter une calèche ; prouvant à tous qu’elle était capable de faire tout ce qu’un homme pouvait faire. Elle se hissa sur sa monture et regarda l’armée qui se préparait autour d’elle. Ils se mirent enfin en route, et Sibille posa un regard sur l’horizon ; embrassant de ses yeux de givre tout ce qui était sien. Et tout ce pourquoi elle se battait désormais.
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