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 2 - Togos

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Togos Conneden
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Togos Conneden
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Date d'inscription : 27/03/2019
Religion et région : Originaire de Tallen, religion des Soeurs

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MessageSujet: 2 - Togos   2 - Togos Icon_minitimeLun 22 Mai - 22:35

Chapitre 2
TOGOS CONNEDEN
« Du sang sur le marbre »
15 Juin de l'An de grâce 21

Le soleil frappait fort sur les armures. Les longs manteaux immaculés tranchaient sur la boue et sur la chaume salit des demeures. Togos menait la marche, son visage glacial aussi froid que la mort. Le capitaine de la garde blanche n'était pas connu pour sa bonne humeur. Sous sa mâchoire carrée, ceinte d'une légère barbe, ces dents ne cessaient de grincer. Aucun homme de la garde ne se serait permis de le reprendre. Leurs légers regards, par-dessus les épaules, parlaient à leur place. Mais Togos n'en avait que faire. Ici, il commandait et personne ne se serait permis de remettre en question ses ordres.

Ils avaient une mission de la plus haute importance. Elle ceignait son front d'inquiétude, seule émotion visible sur le visage impassible. Si leur escouade remontait l'Allée du Grand-Pont, ce n'était seulement pour le plaisir de marcher sur les pavés abimés. On leur avait signalé un noyé à l'aube. Un mort n'était pas une nouvelle sortant de l'ordinaire, ne nécessitait pas le déplacement de la garde royale. Dans la capitale, les pauvres mourraient chaque jours : de faim, de querelle d'ivrogne ou de règlement de compte. Ce cadavre, pourtant, avait secoué jusqu'aux grandes gens du palais. Le badaud était arrivé le teint blafard et avait raconté milles anecdotes toutes plus farfelues les unes que les autres.

Une avait retenu l'attention du capitaine.
Le mort avait une marque gravée sur la hanche.

Et si le Roi s'était bien moqué du sujet, souffrant qu'on le dérange pour un détail aussi insignifiant, Togos avait voulu en avoir le cœur net.

Ses dents grincèrent un peu plus.

Ils passèrent la Porte Dorée, au Sud de la ville. L'or, enfoncé profondément dans les pierres, avait donné son nom à l'entrée secondaire du Palais Blanc, reste des vœux de grandeurs de ceux qui avaient autrefois été roi. Autrefois, quand les tigres ne régnaient encore sur le monde, des buses aux yeux d’acier scrutaient la mer, leurs ailes déployées sur un cri violent. Elles avaient toutes été mises au sol et le bronze fondu pour d’autre dessein. Les Iseal n'avaient pourtant pas tout détruit. Seul le Palais, dans le dos de Togos, était neuf. Le reste souffrait de l'âge et des siècles de pluie. Le peuple essayait pourtant de rendre à la capitale son faste d'entant. En prévision du tournois de la Princesse, on décorait les rues de fanions colorés. Des fleurs enroulaient les panneaux et les auberges sentaient bon le savon. Le fumet de la viande grillée tentait de surplomber l'odeur de merde. Les Talumeniens bordaient la fange de jolis effets et tentaient d'oublier qu'elle restait une déjection.

Un soldat releva la tête, surpris des cris qui encourageaient une villageoise dans son entreprise. Perchée sur un escabeau, elle accrochait à une fenêtre une lanterne de papier rouge. La septième, à en observer ses jumelles dans l'Allée.

— Concentrez-vous Diist, tonna la voix du commandant.

L'autre sursauta, avant d'immédiatement baisser la tête. Ils n'étaient pas là pour visiter. Ses joues se colorèrent. Togos ne fit aucuns autres commentaires.

La troupe sortie de Talumen. Le bruit de la ville les suivait, même une fois les lourdes murailles derrière eux. La ville semblait vivre en dehors d’elle-même, trop petite pour accueillir tous ses sujets. Des marchands avaient dressé des étals, proposant fruits et légumes à des prix exorbitants. Quelques paysans négociaient leur entrée dans la cité, juchés sur des charrettes tirées par des bœufs.
Au moins le Roi pouvait-il se rassurer. Le corps n'avait-il été abandonné entre les murs de la capitale. Le peuple piaillait, Togos l'avait entendu des bouches de cuisinière et palefreniers. Mais jusqu'ici, seuls quelques rares inconnus avaient vu les corps - inconnu qu'ils s'étaient empressés de faire taire contre quelques pièces d'or. Les rumeurs n'enflaient pas encore. Le Roi ne l'aurait pas permis et son Conseil veillait au grain pour que les exigences du vieux monarque soient respectées au pied de la lettre.

L'odeur, à peine la porte passée, le prit à la gorge. Le Roi enverrait rapidement des hommes curer les lieux. Le tournoi d'anniversaire de Nova allait rameuter des nobles de toutes les provinces : hors de question que la capitale paraisse telle qu'elle était réellement aux yeux de ces chacals. Si Sa Majesté faiblissait sous le feu de la maladie, personne ne devait s'en rendre compte. La Paix du Roi comptait plus encore que n'importe quoi dans ce satané royaume. Sa capitale devait être à son image. Grandiose et pleine de vie.

Ironie cruelle quand elle était, pour l'heure, telle Kreivis en personne : sale, malade et gangrenée de toute part.

— Une pièce pour les pauvres, quémanda une voix geignarde.

Elle fût suivie d'une seconde, puis d'une autre et d'une autre encore. Les tenues riches de la garde attiraoent tous les mendiants qui s'approchèrent. Ils suppliaient, sans oser pourtant les toucher. La vue des armes les tenait en arrière, presque autant que la réputation du commandant. Il était de notoriété publique que Togos ordonnait souvent des purges dans les rues de la cité, pour la débarrasser des voleurs et des catins. Ses lèvres se plissèrent sur une moue dégoutée alors qu'il enjambait un corps. Certain mourrait de la misère qui gangrenait le monde. Nokrov décrépissait sur lui-même.

Togos sorti son épée, éparpillant les mendiants instantanément.

Le commandant et ses hommes passèrent l’attroupement que les murailles créaient. Remontant un chemin longeant ces dernières, ils descendirent les marches menant jusqu’à la mer, forgées dans la roche des siècles plus tôt. Se tenant aux murs abîmés par le vent iodé, les gardes avançaient lentement. En bas les attendait une crique sauvage, où seuls les fous et les mouettes avaient trouvé refuge. La proximité de la ville avait éloigné noyeurs et wodianoïs, pour le plus grand plaisir de la garde blanche. Ils avaient l’habitude de tuer des hommes, pas des créatures sorties tout droit des cauchemars. Seul Togos pouvait encore se vanter d’avoir planté son épée dans un revenant. La capitale éloignait la magie et ne restaient que les Seascannes pour se gausser encore de produire des sorcières.
Le reste de Nokrov était libre des horreurs que l’Ere Sanglante avait laissé sur son sillage.
C’est prudemment qu’ils empruntèrent les dernières marches, rendues glissantes par la mer. L’eau s’était retirée avec la marée, offrant aux moules de respirer l’air iodé mais laissant le pavé dangereux.
La crique n’attirait pas le moindre voyageur. Les villageois avaient trop de travail pour perdre du temps en de simple balade et les Nokroviens restaient enfants des superstitions. Si on racontait sur les lieux des histoires, personne ne s’y aventuraient. La curiosité, ici-bas, coutait trop régulièrement la vie.
Seul un cadavre se baignait dans l’eau autrefois turquoise. Il avait tâché la mer de carmin avant de s’échouer. Le corps était gonflé et, alors que Togos s’approcha, des crabes s’échappèrent de sa peau, fuyant sous le sable. Togos repoussa son épée avant de s’accroupir. Son œil expert observa la peau, évitant les stigmates de l’eau pour se concentrer uniquement sur les marques de fer. C’était un vatner, ces tatouages sombres ne trompaient personne. Il avait le visage dur des barbares exilés de l’autre côté du détroit, les traits dévorés par une barbe hirsute et la musculature épaisse de ceux qui ne vivent dans aucuns conforts. Une chose était toutefois certaine : ce n’était pas un noyé. Il était mort avant de sombrer, en témoignant la large balafre qui décorait sa gorge. La main de Togos releva un bras du mort, dévoilant une seconde marque encore récente, que le séjour marin du cadavre avait commencé d’attaquer. Un visage, toujours le même, et un croissant de lune. Les traits du commandant se plissèrent, ses lèvres devinrent encore plus fines. Les adorateurs de ce symbole ne laissaient que des corps sur leur passage. Rien que des gorges tranchées et ce visage féminin dont Togos ne comprenait pas la signification.
Il retourna le Vatner. L’odeur devient épouvantable alors que des gaz s’échappaient du cadavre. Le mort s’était offert un petit séjour dans l’eau avant de daigner s’échouer. Ils auraient pu ne jamais le retrouver.
— Ca aurait été mieux qu’y r’monte pas, vous croyez pas ? demanda un garde, lisant dans ses pensées.
Togos lui adressa un regard glacial pour toute réponse. Les hommes, sous l’influence du Roi, préféraient s’enfoncer la tête sous le sable et ne pas regarder la vérité. Pas de corps, pas de problèmes. Mais les meurtriers étaient là, quelque part. Ils priaient quelque chose. Ils voulaient quelque chose. Et Togos comptait bien les débusquer.
— Apportez-le aux prêtes de Nox au lieu de dire de la merde, Ruck. Ils trouveront peut-être de quoi l’identifier.
Togos ne se faisait pourtant pas de faux espoirs. Les Vatners vivaient loin des terres de Talen. Si leurs tatouages étaient souvent signe de leur clan, ceux de leur mort étaient bien abimés. Alessandre, l’ambassadeur de Valen, peut-être le plus à même de leur communiquer des informations, resteraient coi. Togos imaginait déjà la mine du bellâtre devant le corps. Le chevalier n’était bon qu’à jouter, comme tous les hommes de la cour.
Ils relevèrent le corps, tentant de le conserver en une seule pièce. C'était bien le plus difficile avec les noyers. Contrairement aux autres cadavres, la rigidité cadavérique n’était qu’un souvenir et ils se disloquaient dès qu’on osait tenter de les déloger de leurs eaux mortuaires. Togos laissa faire ses hommes, les dents serrées. Il n’avait pas plus de piste que ces soldats. La mer continuait de vomir des corps silencieux, exempts de tout indice. Toujours le même schéma et certainement toujours les mêmes rituels qu’il ne comprenait pas. Qui pouvait bien sacrifier à ce visage des hommes et des femmes sans nom ?
La garde blanche pataugeait.
Et tous leurs espoirs se transformaient immédiatement en fumée.
Ils allaient avoir besoin de plus d’aide que le simple esprit du commandant. Togos détestait cette simple pensée mais il devait se rendre à l’évidence : il lui faudrait supplier le Roi pour obtenir plus que les simples services de la garde. Il lui fallait le cercle d’informations du Maitre des Secrets. Et par les Déesses qu’il détestait cet homme.
Togos se détourna du mort, que ses hommes tentaient toujours de soulever. Il remonta d'un pas pressé les escaliers, suivi par deux gardes. Il rentrerait, énoncerait une énième fois qu’il y avait eu un assassinat et qu’il n’avait toujours pas plus de piste. Il entendait déjà le rire de cette ordure de Virtus, grinçant que le commandant ne se donnait pas les moyens de réussir avant de passer une nouvelle fois les meurtres au second plan.
Le commandant serra les poings, son front plissé par l’inquiétude. Si le peuple apprenait que les morts se multipliaient, il aurait tôt fait de paniquer. Des civils paniqués étaient dangereux et facilement manipulables. Encore plus à l’approche de l’anniversaire princier. Kreivis voudrait que tout aille vite pour que rien ne parvienne aux oreilles des autres nobles. Que penserait les suzerains s’ils venaient à apprendre que la mort s’invitait même dans la Capitale ? Togos avait envie de hurler à cette simple pensée : le Roi s’intéresserait plus aux commérages qu’au véritable danger. Car si la piste était encore ombrageuse, Togos était pourtant certain qu’elle n’avait que la peur pour objectif. Kreivis avait de nombreux ennemis, bien des nobles qui n’avaient pas accepté sa prise de pouvoir et le contrôle qu’il avait voulu apposer sur l’ensemble de Nokrov. Bien des nobles capables des pires sévices.
Sévices qui se dévoilaient, lentement mais certainement. Il ne savait pas qui était ce Vatner mais une chose était certaine : il était la sixième victime de quelque chose qui dépassait tout ce qu’ils pouvaient imaginer.
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