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 Prologue

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Sibille Asinis
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Sibille Asinis
Messages : 68
Date d'inscription : 05/03/2019

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MessageSujet: Prologue   Prologue Icon_minitimeMar 28 Jan - 1:01

PROLOGUE
PDV TAQI

Résumé:


Le soleil malfaisant rougeoyait au-dessus de l’armée. Sur les cendres des prémices de la guerre, ils avaient établi un campement. Le sang avait coulé dans la nuit, teintant un peu plus le ciel alors même que les victimes n’étaient pas destinées à la Reine Sang. Tout semblait la nourrir, l’abreuver, la renforcer – chaque âme dont le carmin était arraché aux veines rejoignait l’éther et flottait parmi les nuages, flaque écarlate aux sombres augures. Les rebelles avaient voyagé, des semaines durant, avançant à travers des terres qui leur étaient trop hostiles, parcourues de ces lâches qui avaient rejoint les rangs de la Rouge, venant grossir son armée de félons.

Les hommes venus de l’Ouest avaient croisé la route d’un détachement de l’armée royale, des hommes chargés de pacifier la région du Nord au nom de leur Reine. Les hommes du froid, s’ils s’étaient officiellement prononcés en faveur de la Carmine, ployant lâchement le genou, semblaient indécis, requérant de la part de Sibille une milice qui se voulait pacificatrice. Certains villages se proclamaient indépendants, refusant la nouvelle monarchie, tandis que d’autres ne juraient que par leur fidélité envers leur suzerain, lord Oak. Lui, homme faible, trop craintif et trop peu ambitieux, avait préféré se joindre à la majorité – reniant le souvenir des tigres pour leur préférer la Rouge.

Les soldats royaux avaient combattu vaillamment, ne reculant pas alors même qu’ils étaient en infériorité numérique. Eux n’étaient qu’une milice, maigre escouade, et avaient eu le malheur de croiser le chemin d’une armée complète. Les fils des sables, portés par leur hargne et les encouragements de Tahir, avaient détruit leurs ennemis sans peine. Et lorsqu’il n’avait plus resté d’eux que des râles épouvantables et des corps sanguinolents, ils avaient installé leur camp.

Sous l’anormale chaleur de l’aube, les guetteurs se sentaient âmes seules. Autour d’eux, bien trop silencieux, semblait s’animer un monde mort-né. Perchés au flanc de la montagne, dominant les tentes de leur hauteur, ils observaient calmement les fumées des feux que la nuit avait éteints. Les volutes sombres ondulaient lentement et, rencontrant la lueur écarlate, ils semblaient refléter le sang des victimes de cette guerre.
Ils étaient trois à surveiller le côté est du campement, tandis que d’autres avaient été postés à l’ouest. Ceux-ci étaient d’ailleurs bien plus drôles, c’était ce que s’était dit Taqi lorsqu’il avait été choisi pour ce tour de garde. Tandis qu’eux devaient jouer aux cartes pour passer le temps, lui était seul dans ses pensées. Il jeta un coup d’œil à ses compagnons de ronde, deux hommes que l’âge commençait à gagner tandis que lui n’était encore qu’un gamin.

Du haut de ses quinze ans, Taqi avait toujours souhaité être homme d’exception. Troisième fils d’un petit noble, il avait voué sa vie à Oneone, lui offrant son cœur ainsi que son épée. Il avait d’ailleurs souillé celle-ci pour la première fois de sa vie, la nuit précédente, allant déchirer les chairs d’un ennemi trop peu coriace. Il l’avait regardé dans les yeux avant de lui ouvrir le ventre d’un coup habile, y avait lu la candeur de la jeunesse, l’inexpérience de l’enfant. Et il s’était tu, n’avait plus osé parler tant il s’était retrouvé en lui. Assassin de son propre miroir, voilà ce qu’il semblait être.

— Ça va, le p’tiot ?

Une voix rugueuse à ses côtés l’arracha à ses pensées et Taqi tourna la tête vers l’un de ses compagnons d’infortune. Combattant aguerri, Sulqua avait la guerre accrochée à ses traits. A sa joue, les combats avaient gravé une large balafre. Celle-ci semblait fendre son visage en deux, rappelant les masques des cérémonies religieuses que Taqi avait organisé avant de partir à la guerre. Les lèvres sèches du guerrier paraissaient avides de sang et d’aventures, lui qui ne semblait craindre ni la mort, ni les dieux. Le destin, auquel le jeune religieux ne croyait que trop, devait être superflu aux yeux de Sulqua – lui qui ne jurait que par la force et la détermination, devait attendre que le sort lui tombe dessus un jour, sans prévenir.

Taqi accrocha son regard avec embarras et força un sourire à ses lèvres en hochant la tête. Sulqua s’étira ; dans son geste, il donna un coup de coude à leur autre compagnon, Easnab. Celui-ci, peu sérieux, fut tiré de son sommeil. Dans un grognement presque animal, il ouvrit douloureusement son œil unique et observa les deux autres hommes. Reniflant négligemment, il prit à sa ceinture une gourde et y but à grandes goulées. Après quelques gorgées, il reposa son regard sur Taqi et Sulqua, leur envoyant son haleine avinée dans une expiration satisfaite. Le tout jeune homme pinça légèrement les lèvres.

— Vous devriez pas boire, m’sire.
— J’suis pas un sire, grogna Easnab.

Taqi détourna le regard, gêné. Il se sentait simple poussière face à ces deux hommes qui n’avaient que trop côtoyé le fracas des batailles. Pourtant, l’éborgné lui tendit l’outre à laquelle il avait bu quelques secondes plus tôt. Le jeune religieux refusa d’un léger mouvement de la tête.

— A la guerre, c’est avec ça qu’on survit.

Il regarda Sulqua, qui souriait en coin après avoir prononcé ces mots. Il prit la gourde et en but une goulée avant de la tendre à nouveau à Taqi. Après une hésitation, il s’en saisit et goûta à son tour l’alcool. Les traits de son visage se contractèrent sous le dégoût et il avala douloureusement, dans un rire des deux guerriers.

— On boit pour s’donner une raison d’oublier, petit, l’oublie pas, grommela Easnab.

Taqi le questionna d’une œillade, l’incitant à expliquer ses paroles qui dissonaient avec le regard de vieux sage qu’il posait sur l’horizon.

— Les trajets sont longs et épuisants, les nuits rudes, les combats douloureux. Et on perd la notion du temps parce que tous les cauchemars deviennent réels.

Le jeune homme refusa de laisser son visage se décomposer aux mots du borgne. Il dépeignait une bien triste réalité, celle qui désormais était leur. Il se perdit un instant dans ses pensées, tentant de se rappeler quand l’armée avait quitté Aurovao – mais tout semblait flou, à la fois trop lent et trop rapide. Il lui semblait qu’ils avaient levé le camp, deux semaines plus tôt. Sans doute un petit peu plus. La traversée du désert d’Oneone avait été longue, et si les sables avaient été cette fois-ci leurs ennemis, comme tentant de les cracher au plus vite loin d’eux ou bien de les avaler, ils lui manquaient plus que de raison.
Les Ramaliens étaient casaniers, attachés à leur terre et refusant de céder ou quitter celle-ci. Ceux qui, parmi eux, avaient plié devant la Reine Sanglante, n’étaient que des lâches. Jamais ils n’auraient droit au pardon d’Oneone.

— Aux dernières nouvelles, les Vatners y sont bien sur leurs bateaux !, souffla Sulqua dans un rire amer.
— On a eu des nouvelles d’eux ? l’interrogea Taqi.

L’homme à la balafre hocha vivement la tête :

— Leur parodie de dieu semble être avec eux. Ils étaient tout au nord y’a quelques jours.
— Ils vont bien plus vite que nous, grommela l’éborgné. Ce serait pas prudent qu’ils arrivent trop tôt non plus.

Arrachant la gourde à Taqi pour s’en envoyer une grande gorgée, Sulqua laissa échapper un rire franc.

— T’en fais pas pour eux. Non seulement y sont féroces, mais en plus y vont d’voir traverser les Seascannes à pieds. Et tout le monde sait qu’c’est pas chose aisée !, lança-t-il.

L’autre guerrier laissa un rire, semblable au grognement d’un loup, lui échapper. Son œil unique se balada sur le camp et Taqi se joignit timidement à son observation. Il aperçut alors, parmi les tentes encore endormies, la silhouette fine du jeune Afi qui s’agitait. Une hache à la main, le gamin envoyait le tranchant de l’arme dans l’air, comme frappant un adversaire imaginaire. Le jeune garçon n’avait rien de son père, et tout en sa personne rappelait la fougue d’un fils des sables – pourtant, dans son cœur semblait hurler Uibh, la rage des mers, la hargne des Vatners.

— L’autre abruti de Hvitur lui a mis de sales choses en tête, gronda Sulqua.

Taqi le regarda et haussa les épaules. Lui était persuadé que l’essentiel était de trouver sa place, quelle qu’elle soit, en Nokrov. Ce n’était pas chose aisée, souvent interdite, pourtant, il croyait en l’esprit indomptable d’Afi. Ce gamin était surprenant sur bien des points.

Alors que Taqi se perdait encore dans ses pensées, les yeux absorbés par la vision de l’entraînement intensif de l’enfant, un vrombissement perça le ciel. Dans un sursaut, le religieux se retrouva sur ses deux pieds, son épée encore tachée de sang tirée de son fourreau. Il parcourut du regard l’éther, tentant d’en extirper les mystères, l’origine de ce son si particulier.

Puis il vit. Au loin, venant de l’Ouest et allant sans doute vers la capitale, les trois monstres qui hantaient les légendes de sang. Les créatures volaient à toute vitesse, faisant frémir le monde entier sous leurs rugissements stridents. Jamais il n’avait entendu de son si aigu. Le plus gros des trois sembla piquer vers le camp, comme hurlant à la mort, et laissa simplement tomber un corps au pied de la montagne sur laquelle les gardes étaient perchés. Si celui-ci paraissait à appartenir à une femme, il était en charpie, lacéré, et pourtant pas dévoré.
Le cadavre sanguinolent, quelques mètres sous les pieds de Taqi, déversa une mare de sang qui souilla un peu plus la terre. Il releva ses pupilles effarées vers les sangéravs, qui rugissant toujours, tournoyaient au-dessus du campement.

A l’autre bout de l’amas de tentes, des oliphants sonnèrent le danger. En écho, Easnab se saisit de son cor et le fit sonner aussi. Les toiles des tentes se soulevèrent pour dévoiler les visages apeurés des guerriers tandis que, dans un battement d’ailes qui fit frémir le monde, les monstres déjà s’éloignaient, survolant les veilleurs et la montagne – retournant à leur maîtresse.

Les trois gardes descendirent en courant au cadavre, ne découvrant rien d’elle, et tandis qu’ils se perdaient dans l’observation horrifique de ce corps en lambeaux, Tahir vint à eux. Son regard était celui de l’homme se refusant à la défaite. Son visage, celui du conquérant que rien ne saurait arrêter. Un homme en marche, un seigneur déchu qui retrouverait, coûte que coûte, ses possessions.
Le fier aigle se tourna alors vers son armée qui se massait près de la montagne, terrifiée, en mal de courage – attendant qu’il ordonne. Et il ordonna.

— Nous reprendrons la route d’ici une demi-heure tout au plus. Levez le camp !
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Prologue

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